Blonde, blanche, brune, rousse : il est de coutume de désigner la bière par la couleur qu’elle arbore dans nos verres. Mais est-ce que vous savez réellement à quoi ces différentes robes correspondent, ce qu’elles impliquent pour la dégustation et comment nous les obtenons ?
Blonde, brune, rousse : qu’est-ce qui fait la couleur de la bière ?
Pour une première approche de la couleur de la bière, on peut penser au vin. Si le vin rouge est si carmin, c’est que ses grains de raisin sont d’un rouge foncé presque noir. Et pour de nombreux blancs, on utilise donc du raison blanc, comme le Muscat. Évidemment, ce n’est pas une comparaison idéale : de nombreux champagnes sont à base de pinot noir, un cépage rouge qui a macéré sans la peau…
Mais ce qui est semblable, c’est bien que c’est l’un des ingrédients de la bière qui lui donne sa couleur. Et en l’occurence, cet ingrédient clef, c’est le malt ! Pour faire simple : au plus votre malt est blond, au plus votre bière sera claire. Et à l’inverse, un malt brun ou noir donnera des bières éponymes.
Une bière fait appel à du malt mais aussi des levures et du houblon. Il est donc assez erroné de penser que seule la couleur peut permettre de différencier des bières ! Une même « bière blonde » pourra changer du tout au tout selon les houblons utilisés (Mosaic vs Sorachi) et le moment où on les incorpore. Mais ça, c’est une affaire que nous explorons dans un autre article…
Bref, en allant dans un bar à bière et en réclamant « une pinte de blonde », il est bien possible que l’on vous regarde avec étonnement tant cela donne une idée très vague de ce que vous recherchez comme breuvage.
La couleur de la bière, ou la science du maltage
Mais revenons-en à nos moutons, et plus précisément aux assemblages de malt qui permettent de viser la couleur de la bière qu’on veut brasser. La European Brewing Convention (Convention Européenne du Brassage) a mis en avant les couleurs types des bières en fonction de l’échelle EBC du même nom (photo ci-dessous).
Pour réaliser telle ou telle couleur de bière, les brasseurs jouent donc aux peintres en combinant malts clairs, dorés ou foncés. Mais vous vous demandez peut-être – à juste titre – comment on obtient ces différences de couleurs, alors que le produit de base est le même ?
Tout se joue à la cuisson. En effet, avant d’être utilisées dans un brassin, les céréales (orge et blé en majorité) subissent plusieurs étapes :
- trempage
- germination
- touraillage
- dégermage
- torréfaction
C’est lors de cette dernière étape (qui est facultative) que l’on va venir rôtir les malts comme on le ferait pour des grains de café. À mesure qu’ils cuisent, leur coloration change et ce qu’ils apporteront à la bière également. On distingue 4 grandes catégories :
- Malt pâles · peu touraillés, ce sont les malts les plus répandus qui servent de base à chaque bière blonde
- Malt caramel · joliment dorés, pas plus. Ils apportent évidemment des notes caramélisées, particulièrement prisées dans les bières ambrées ou rousses
- Malt tourbé · assez peu répandu, ce malt à whisky est touraillé avec de la fumée et de la tourbe, pour des notes presque terreuses utilisées dans les bières fumées
- Malt torréfiés · une grande famille utilisée dans toutes les bières sombres, qui développe des saveurs de café, de cacao et de chocolat à mesure que vous torréfiez ses grains
Notons que les bières ambrées peut aussi faire appel à du seigle dans leur recette, ce qui accroit leur allure rousse et leurs notes si spécifiques
Quid de la couleur de la bière blanche ?
Les bières blanches sont peut-être les bières dont le nom est le plus trompeur. En réalité, nous devrions plutôt parler de bières de blé ! En effet, une bière blanche est une bière qui fait appel à au moins 30% de malt de blé dans sa recette. Ce taux monte à 50% pour les bières blanches allemandes. Ce blé, aussi appelé froment, est souvent associer à des saveurs d’agrumes (comme chez la Witbier belge aux écorces d’oranges) ou à des notes de banane et de levure (chez la Weizen allemande).
Mais le malt de blé peut très bien être lui aussi torréfié ! Et là, patatra…
On se retrouve alors face à des bières blanches … noires ! C’est le cas de la Dunkelweizen, un style de bière dont le nom signifie littéralement « sombre bière de blé« . Mais comme Weizenbier et Weissbier (bière blanche) se ressemblent en allemand, les abus de langage nous ont amené en France à parler d’une bière selon sa couleur alors même qu’elle n’y répond pas forcément.